L’éjaculation précoce en France : un trouble fréquent, encore tabou, mais qui se soigne

L’éjaculation précoce se caractérise par l’incapacité à contrôler l’éjaculation, qui survient de façon systématique ou quasi systématique avant ou juste après la pénétration, souvent en moins d’une à deux minutes. Cette rapidité entraîne une souffrance personnelle, un sentiment de frustration, voire un évitement de l’intimité sexuelle. Il n’existe pas de seuil universellement admis en termes de durée : pour la majorité des hommes interrogés, un rapport sexuel durant moins de cinq minutes est considéré comme précoce.

Combien d’hommes sont concernés en France ?

Les études convergent pour montrer que l’EP touche une part importante de la population masculine française :

• Selon une enquête Ifop, 71 % des hommes sexuellement actifs déclarent avoir déjà rencontré ce problème au moins une fois dans leur vie, et 42 % disent que cela leur arrive souvent ou parfois.
• 20 à 30 % des hommes en France seraient concernés de façon récurrente par l’EP, soit environ un homme sur cinq à un homme sur trois selon les sources.
• Près d’un tiers (31 %) des hommes ont déjà éjaculé avant même la pénétration au moins une fois dans leur vie.
• L’EP n’a pas d’âge : elle peut survenir dès les premiers rapports sexuels (forme primaire) ou apparaître après des années d’activité sexuelle « normale » (forme secondaire).

Ce trouble, loin d’être anecdotique, a un impact réel sur la qualité de vie : 29 % des femmes déclarent que l’EP a déjà été à l’origine d’une rupture, contre 15 % des hommes.

Un trouble sous-estimé, source de honte et d’isolement

Malgré sa fréquence, l’EP reste peu abordée en consultation médicale. À peine 16 % des hommes concernés en ont parlé à un professionnel de santé, souvent par honte ou par peur d’être jugés. Beaucoup tentent de trouver des solutions par eux-mêmes, parfois en ayant recours à des méthodes inefficaces ou dangereuses. Le sentiment de ne pas être « à la hauteur », la peur de décevoir le ou la partenaire et la pression sociale autour de la performance sexuelle renforcent le tabou et l’isolement.

Quelles sont les causes de l’éjaculation précoce ?

Les origines de l’EP sont multiples et souvent intriquées :

• Facteurs biologiques : une hypersensibilité du gland, un déficit en sérotonine (neurotransmetteur), des troubles hormonaux ou métaboliques peuvent être en cause.
• Facteurs psychologiques : stress, anxiété de performance, dépression, problèmes relationnels, manque de confiance en soi.
• Facteurs comportementaux : apprentissage sexuel centré sur la rapidité, manque de communication dans le couple, méconnaissance du corps.

Dans la majorité des cas, aucune cause unique n’est identifiée, ce qui explique la diversité des prises en charge.

Comment se soigne l’éjaculation précoce ?

Heureusement, il existe aujourd’hui de nombreuses solutions efficaces, adaptées à chaque situation :

Approches comportementales et psychothérapeutiques

• Thérapies comportementales et cognitives : elles visent à apprendre à contrôler l’excitation et à retarder l’éjaculation grâce à des techniques spécifiques (méthode du « stop and start », technique du « squeeze »). Ces exercices sont souvent réalisés en couple et accompagnés par un sexologue.
• Psychothérapie : utile en cas de troubles psychologiques associés (anxiété, dépression, difficultés relationnelles).

Traitements médicaux

• Médicaments oraux : certains antidépresseurs de la famille des inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) comme la paroxétine, la sertraline ou la clomipramine, pris quotidiennement ou à la demande, ont montré leur efficacité pour retarder l’éjaculation. Le Priligy (dapoxétine) est un traitement spécifique disponible sur ordonnance.
• Anesthésiques locaux : des crèmes ou sprays à base de lidocaïne ou de prilocaïne appliqués sur le gland diminuent la sensibilité et permettent de retarder l’éjaculation.
• Injections d’acide hyaluronique : cette technique, pratiquée par certains urologues, consiste à épaissir le gland pour réduire sa sensibilité. Le taux de succès varie entre 80 et 90 %, avec un effet qui dure en moyenne un an.

Conseils complémentaires

• Utilisation du préservatif : il peut diminuer la sensibilité et aider à prolonger le rapport.
• Travail sur la respiration et la gestion du stress : des exercices de relaxation ou d’hypnose peuvent être proposés.

Vers une meilleure prise en charge

L’essentiel est de ne pas rester isolé : l’EP se soigne dans la majorité des cas, et la combinaison de plusieurs approches augmente les chances de succès. Parler à un professionnel de santé, seul ou en couple, permet de dédramatiser le trouble et d’ouvrir la voie à une sexualité plus épanouie.

L’éjaculation précoce concerne un nombre très important d’hommes en France, toutes générations confondues. Si ce trouble reste tabou, il existe aujourd’hui des solutions efficaces, qu’elles soient comportementales, psychothérapeutiques ou médicamenteuses. Oser en parler, consulter un professionnel et s’informer sur les différentes options sont les premières étapes vers une prise en charge efficace et une meilleure qualité de vie sexuelle et relationnelle.